Escapades urbaines : les plus grands marchés aux puces d’Amérique latine Volet 2

Des trésors d’art, d’histoire et d’architecture

La suite de notre dossier consacré aux marchés aux puces les plus emblématiques

d’Amérique latine.

 

Au milieu des vieux livres et des objets de curiosité se racontent l’histoire et les histoires

Plus populaire que son homologue de Gávea, la Feira de Antiguidades da Praça XV, à Rio, se tient tous les samedis depuis les années 1970. On trouve, dans ce marché en plein air à deux pas de la gare maritime, tout ce qui fait un bon vide-greniers : de belles antiquités et des objets rares de différents styles et époques, des pièces de monnaie, des vêtements, de la déco, des BD, de vieux appareils photos ou accessoires de cuisine…

 

(Photo publiée sur la page Facebook de l’événement – @feiradapracaxvrj)

 

Il convient d’y arriver tôt pour faire des affaires sans hésiter à négocier, dans la bonne humeur, avec les centaines de vendeurs qui perpétuent cet événement incontournable. Car des raretés se cachent parmi leur vaste bazar, des effets personnels de la famille royale portugaise et sa cour, arrivées au Brésil au début du XIXe siècle après l’invasion du Portugal par Napoléon, à des objets plus ordinaires mais à la valeur affective inestimable.

Non loin de là, à Lapa, a lieu une autre brocante majeure : la Feira do Rio Antigo. Le 1er samedi du mois, les édifices coloniaux plus ou moins préservés qui bordent la rua do Lavradio deviennent pour quelques heures des boutiques sommaires devant lesquelles s’installent des centaines de stands d’antiquités, d’objets faits-main, de vêtements, de meubles et de nourriture à manger sur le pouce en profitant des tables installées çà et là. Le tout dans une réjouissante ambiance musicale, notamment assurée par les orchestres de samba ! Quand elle ne voit pas affluer plus de 15 000 férus de la feira, cette rue qui fut à sa création en 1771 la première rue résidentielle de Rio inspire parfois les street-artistes. Mais elle s’anime surtout les fins de journée venues, prisée des noctambules pour ses bars.

 

(© Halley Pacheco de Oliveira via Wikimedia Commons)

 

À l’image d’Antigüedades Imperio à San José, l’une des rares enseignes d’antiquités du Costa Rica, certains hauts lieux du chinage sont des bâtiments « en dur » où l’on brocante, bazarde et marchande à l’abri des aléas météorologiques. Passer un moment dans ce magasin est d’autant plus intéressant que les pièces qui s’y vendent sont d’une grande diversité.

 

(Photo publiée sur la page Facebook @antiguedadesimperiocostarica)

 

Saints, bronzes, meubles, tableaux, horloges, bijoux, monnaie, argenterie… Les objets qui capturent l’esprit et l’histoire du pays côtoient les meubles importés ou rapportés, d’Europe ou d’ailleurs. Mais nul besoin d’être un numismate accompli ou un historien d’art pour apprécier la déambulation au milieu des petits bibelots ou des imposants vases, ni pour trouver des souvenirs originaux à rapporter de voyage…

 

(Photo publiée sur la page Facebook du Mercado de las Pulgas Dorrego @mercadodepulgasdorrego) 

 

Autre terrain de jeu couvert pour les chineurs, le Mercado de Pulgas Dorrego ouvre ses portes du mardi au dimanche dans le quartier de Colegiales à Buenos Aires. Ce spot incontournable pour qui recherche une pièce vintage dans la cité porteña n’a plus son charme labyrinthique d’antan, mais il demeure un bon conseil de visite. Réinstallé en 2011 à son emplacement initial après des travauxle marché compte près de 150 stands répartis sur 13 400 m² et bien organisés par spécialités : verrerie et arts de la table, luminaires, affiches et photos anciennes, mobilier d’époque ou design… À l’ombre du vaste hangar divisé en salles, dans lesquelles fouiller demande du temps, on peut aussi faire une pause bien méritée devant quelques empanadas.

 

Le plaisir de chiner dans un monument historique, un lieu improbable ou un décor inattendu

 

(Photo publiée sur la page Facebook @oficialferiadelanticuario)

 

Toujours dans la province de Buenos Aires, mais cette fois à une vingtaine de kilomètres au nord de la capitale, on se retrouve parfois pour brocanter dans un cadre peu commun : le quai de gare de la belle station « Las Barrancas », dans le district de San Isidro, desservie par le Tren de la Costa qui longe le Rio de la Plata entre Olivos et Tigre. Les samedis, dimanches et jours fériés, la Feria del Anticuario qui se tient ici à deux pas des jolies maisons d’Acassuso n’attire pas seulement pour ses antiquités, objets rares et autres curiosités. On y vient aussi pour l’expérience inédite qui consiste à chiner horloges, poupées, plaques publicitaires rétros et gadgets insolites dès la descente du train, les 70 stands installés au pied des grands arbres longeant en grande partie la voie ferrée quand ils ne sont pas déployés à même le hall de gare construit en bois.

Presque aussi surprenante que la brocante à laquelle on accède en train côtier, la brocante qui se tient… sous un musée. Ce concept plutôt étonnant de prime abord prend pourtant forme une fois par semaine depuis 1979 sous l’enceinte brutaliste du Museu de Arte de São Paulo (MASP), signée de l’architecte italo-brésilienne Lina Bo Bardi.

 

(© Andre Savastano via Wikimedia Commons)

 

Une quarantaine d’exposants se retrouvent chaque dimanche pour la Feira do MASP, à l’abri du spectaculaire édifice que ses quatre piliers rouges en béton précontraint maintiennent 8 mètres au-dessus du sol. Contrairement à leur lieu de vente, les objets antiques ou de seconde main qui s’y négocient ne présentent pas toujours d’originalité particulière. Mais la seule découverte d’un monument pauliste iconique justifie de tenter sa chance au gré des étals et, qui sait, de trouver son bonheur entre gramophones, médaillons et figurines.

Pourquoi ne pas chiner directement « à la maison » ? La Casa Belkis, à La Havane, est un magasin d’antiquités familial installé dans une belle demeure du Vedado pleine à craquer de piles d’assiettes, de verres de toutes les formes et de bibelots comme figés dans le temps. Présentés à même les meubles et les cartons ou simplement posés par terre, les objets innombrables font de cet maison à la vocation insoupçonnable un vrai temple de l’accumulation préservé du temps, dont on devine les propriétaires insensibles aux sirènes du marketing. Rendue aventureuse par une disposition générale précaire, la déambulation dans ces lieux surchargés est une expérience forcément inoubliable.

Autre capitale, autre environnement mais même plaisir de fouiller parmi un bazar qui mérite plus ou moins bien ce nom : Santiago n’a pas à rougir de son offre en matière de foires aux antiquités. Les amoureux de l’ancien doivent impérativement inscrire à leur programme la visite du Galpón de Los Reyes, vaste hangar ferroviaire dont la légende attribue les plans à Gustave Eiffel et qui servit de gare pour les tramways au tout début du XXe siècle.

 

(Photo publiée sur le site officiel du Galpón de los Reyes – @galponlosreyes)

 

L’édifice historique qui borde le Parque de Los Reyes, à l’angle de l’Avenida Brasil et l’Avenida Balmaceda, est aujourd’hui un véritable centre commercial spécialisé dans les antiquités. Commerçants et artisans sont plus de 200 à proposer des objets ou meubles de collection qui s’accumulent du sol jusqu’au plafond, parfois superposés autant qu’ils sont entreposés : tables, chaises, lustres, boites en métal vintage, vêtements, livres, reliques religieuses…

À quelques kilomètres de là, il est encore question d’entrepôts reconvertis pour le plus important marché aux puces de Santiago, le gigantesque Persa Bío Bío, situé principalement le long de Placer entre les rues San Diego et Victor Manuel.

 

(Page Facebook @persabiobio)

 

Outre les antiquaires qui opèrent dans les anciens bâtiments à vocation industrielle, les rues sont ici investies par des détaillants de meubles ou de marchandises de qualité variable parmi lesquelles vêtements, deux-roues, matériel informatique, jeux vidéo et autres DVD piratés. C’est le week-end que ce marché inclassable est le plus animé et le plus fréquenté. Chacun a alors tout son temps pour apprécier l’excursion et, pourquoi pas, l’agrémenter d’une dégustation d’empanadas ou de jus de fruits frais aux stands de restauration disponibles sur place.

Puces, brocantes et foires aux antiquités sont autant d’occasions d’en savoir plus sur un pays, sa culture, son passé et ses traditions, qu’elles soient artistiques… ou culinaires ! Et même si ce commerce de l’unique et de l’authentique ne se solde pas toujours par un achat, il fournit à coup sûr de jolies découvertes et de vraies émotions.

 

(Persa Bio Bio ©Bilocicles via FlickR)