Qui n’a pas, comme Valéry Larbaud, rêvé de ces trains de légende « Prêtez-moi ô Orient-Exprès vos miraculeux bruits sourds et vos vibrantes voix de chanterelle ; Prêtez-moi la respiration légère et facile des locomotives… »
Les chemins de fer d’Amérique Latine ont aussi leur propre histoire datant de la fin du XIXe. Les grands réseaux de voies ferrées, d’Argentine, Brésil, Chili, Bolivie, ont du faire face à la concurrence bus/avion. Aujourd’hui restent encore de merveilleux petits trains de légende, souvent tirés par d’anciennes locomotives à vapeur. Certains ont été modernisés, mais reflètent toujours le faste de l’époque du Pullman des années 1920, et effectuent de longs parcours. D’autres, ne serait-ce que l’espace d’une journée, assurent de petits trajets touristiques pour visiter des vignobles au Chili, des plantations d’agaves pour la tequila au Mexique, les bananeraies qui bordent au Brésil l’ancienne route de l’or, ou le parc de la Terre de Feu, au bout du monde en Argentine. Toutes ces suggestions nous permettent de profiter de ce mélange magique entre histoire et nature, que l’on apprécie en parcourant montagnes, volcans et vallées, parmi des paysages extraordinaires. Chaque voyage a son propre imaginaire, sa propre aventure !
Argentine
El Tren de las Nubes. Considéré comme l’un des trains parmi les plus élevés du monde, à plus de 4000 mètres d’altitude, relie Salta à San Antonio de los Cobres. Comme son nom l’indique, le « Train des Nuages » semble côtoyer le ciel. Traversant les vertigineuses montagnes de la Cordillère des Andes, sur fond de ciel bleu, il nous offre des vues magnifiques sur les hauts sommets. Grâce à 13 viaducs métalliques, 29 ponts, une des grandes oeuvres de l’ingénierie, il enjambe ravins et précipices, passe dans des tunnels, s’accroche aux parois rocheuses, parmi des paysages impressionnants. La voie ferrée qui le soutient est considérée comme l’une des plus spectaculaires au monde. Le Train des Nuages fonctionne régulièrement depuis quatre ans avec un départ par semaine, le samedi, entre les mois de mars et novembre. Pour des raisons climatiques et de sécurité, il ne marche pas le reste de l’année.
Le Libertador. C’est l’un des trains les plus mythiques du pays, qui va renaître en octobre prochain. Pendant des décennies, le Libertador faisait le trajet entre la capitale argentine et les villes de Mendoza et San Juan situées au pied des Andes. Il avait arrêté de fonctionner en l993. À nouveau il reprend son service et va relier Buenos-Aires à Mendoza, permettant aux passagers de poursuivre leur route jusqu’au Chili. Il assurera un service hebdomadaire avec le luxe des trains d’antan, en empruntant l’ancienne ligne qui traversait l’Argentine, passait par la Pampa, puis par Junin pour arriver aux pied des Andes. La route offre l’une des vues les plus spectaculaires et admirables sur les cimes enneigées de l’Aconcagua, le point culminant du continent américain. Le Libertador unira ensuite Mendoza à San Juan où les voyageurs pourront prendre le Sanjuanino, un autre train historique.
Le train du Bout du monde. Ce Train propose un parcours touristique dans le Parc National de la Terre de Feu. Au départ d’Ushuaia, il emprunte le même parcours que celui de la voie ferrée étroite, construite en 1896 par les bagnards pour transporter le bois, c’est grâce à eux qu’en 1910 on inaugura le train le plus austral du monde
Brésil
Inaugurée en 1881 par l’Empereur Pedro II, la gare de São João del Rei fait partie de l’histoire des chemins de fer de Minas Gerais. La ligne s’est arrêtée en 1960, mais la gare est aujourd’hui le point de départ d’un parcours touristique de douze kilomètres entre São João del Rei et Tiradentes. La Maria Fumaça, une magnifique locomotive à vapeur sortie des usines de Philadelphie en 1908, vous emmène au rythme de l’époque, 12 km par heure, visiter la région parmi bananeraies et paysages vallonnés. L’arrivée à Tiradentes : cette ville provinciale mythique, au cœur du Minas Gerais, cachée dans la verdure, au bord du Caminho Velho, (vielle route de l’or), est le reflet du vieux Brésil portugais historique porteur des traditions brésiliennes.
Costa Rica
Fin XIXe, deux lignes chemins de fer ont été construites pour améliorer les débouchés commerciaux de produits tels le café et la banane et faciliter leur acheminement vers les ports de l’Atlantique et du Pacifique. Construites entre 1877 et 1897, en pleine forêt, à travers un territoire accidentée, soumis aux pluies et aux maladies, la ligne de l’Atlantique a cessé de fonctionner en 1991, à la suite du tremblement de terre du 22 avril. Celle du Pacifique a été interrompue en juin 1995, en raison de pertes financières de l’administration chargée de l’exploitation. « Les chemins de fer costariciens sont décrits avec moult détails et admiration par les voyageurs de la fin du XIXe et du début du XXe »
Petit train à vapeur. Ce célèbre petit train est une belle réplique d’un train à vapeur, il vous emmène à la découverte du cœur de la forêt des Nuages de Monteverde, tropicale humide, situées entre 1 000 et 3 000 mètres d’altitude, baignée dans une brume fréquente. Il vous invite à une promenade d’environ une demi journée. La compagnie ferroviaire possède deux trains de 50 places.
Chili
Le petit train du vin était bien connu, et fonctionnait jusqu’au dernier tremblement de terre. Il est intéressant de mentionner cette véritable machine à remonter le temps et à revivre les émotions du passé. C’était l’un des derniers modèles construits au Chili en 1913, tiré par une locomotive à vapeur qui fonctionnait au charbon, à la vitesse de 30 à 40 km par heure. Il partait de la ville de San Fernando, jusqu’à Santa Cruz, longeant les principaux vignobles de la vallée de Colchagua, productrice des meilleurs vins rouges. C’était un très beau parcours de quatre- vingt- dix minutes. À bord, dégustation de vins chiliens accompagnés d’une nostalgique musique andine, souhaitons que ce voyage hors du temps soit un jour rétabli.
Mexique
Le petit train le « Chepe » (abréviation de Chihuahua-Pacifique) est le plus ancien et le plus connu. Créé en 1961, il assure la liaison ferroviaire entre Los Mochis et Chihuahua, seul train à ne pas transporter que des touristes. Il traverse les paysages majestueux de la Sierra Tarahumara, à la rencontre des Indiens du même nom, région où l’on retrouve les témoignages les plus importants de leur histoire et de leur culture ; puis on s’engouffre dans le Canyon du Cuivre, plus grand même que le cañon du Colorado, ce paysage grandiose sert de toile de fond à un trajet fantastique digne des meilleurs films. Elégantes voitures, avec restaurant et bar d’où l’on admire le très beaux paysage.
« Le Tequila Express, la Leyenda » est un petit train de quatre wagons pouvant accueillir 68 personnes. Il effectue, en deux heures et demi, le trajet entre Guadalajara et Amatitán parmi les champs d’agaves, déclarés patrimoine de l’humanité par l’Unesco. C’est un beau voyage hors du commun, les passagers pénètrent dans le monde de l’élaboration de la boisson la plus représentative du Mexique, « La Tequila » en visitant l’Hacienda San José del Refugio, la plus ancienne du pays, où l’on produit la Tequila Herradura. Une bonne Tequila doit contenir au moins 60% pour cent d’agaves, il existe au Mexique 400 variétés d’agaves.
« L’Express Jose Cuervo » ce train de luxe part aussi de Guadalajara, offre une journée au cœur du Mexique, une autre façon de déguster la fameuse boisson mexicaine, mais surtout l’occasion de découvrir la ville de Tequila qui lui a donné son nom. Le train compte sept wagons et peut accueillir 395 passagers.
Equateur
La Nariz de diablo est l’un des trains les plus extraordinaires d’Amérique Latine, sa construction est une prouesse technique d’ingénierie ferroviaire. La voie escalade en zigzagant la cordillère des Andes à 2346 m d’altitude, et s’enroule tel un serpent autour de la montagne. Elle passe à côté d’un rocher qui, selon la légende, a l’air d’un diable, d’où son nom de Nez du Diable. Construite au début du XXe siècle pour relier Guayaquil sur la côte, à Quito, à 2800 m d’altitude, victime d’un manque d’entretien et de phénomènes météorologiques, la voie n’était utilisable que sur 100 km et a interrompu son activité en 2010.
En 2012 le Gouvernement prend les choses en mains, investit et réhabilité 456 km de voie. Il établit un programme touristique de quatre jours dénommé « Tren Cruzero », qui relie les Andes à la côte Pacifique avec plusieurs arrêts prévus dans des sites touristiques et des haciendas. Des locomotives à vapeur, datant du siècle precédent, sont utilisées sur certains trajets dont le petit voyage à bord du petit train « La Nariz del Diablo ». Le mieux est de se rendre à Riobamba en bus, en empruntant la merveilleuse route des volcans, qui permet d’admirer les paysages andins, les marchés indiens typiques, aux vives couleurs et les villes coloniales d’Ambato et de Latacunga. Par beau temps, la vue sur les volcans enneigés est magnifique. À Riobamba on embarque à bord de la Nariz del Diablo. Après avoir traversé les petits villages incrustés dans la montagne, on arrive à Alausi en plein Altiplano, pour entreprendre l’impressionnante descente, en zigzag, des pentes de la Cordillère jusqu’au littoral. Au lointain l’ombre du Chimborazo s’estompe tandis que devant nos yeux s’étend une vue panoramique exceptionnelle. Petit à petit la nature évolue, la température aussi, les plantes tropicales font leur apparition sur les pentes de la montagne, nous arrivons sur le littoral.
Pérou
Au Pérou, comme dans tous les pays andins, les voies de chemins de fer sont parmi les plus élevées du monde, ce qui a supposé des travaux titanesques pour leur construction, mais donne lieu à des vues panoramiques spectaculaires. Il y a plusieurs types de trains, de confort différent, certains plus modernes que d’autres.
Le train Hiram Bingham, somptueux train de la Cie. Peru Rai, est l’une des excellentes manières de se rendre de Cuzco au Machu Picchu. Il conduit à la découverte du site grandiose de l’ancienne cité des Incas, perdue au sommet de la montagne, parmi une végétation de climat sub-tropical très développée, où l’on dénombre plus de 90 espèces d’orchidées. La voie de chemin de fer longe la tumultueuse rivière Urubamba, franchit la montagne Picchu, atteint Arco, le point le plus élevé, passe par plusieurs bourgades, traverse les paysages magnifiques des Andes, descend vers la Vallée Sacrée jusqu’au Machu Picchu, l’une des sept merveilles du monde, patrimoine de l’Unesco, où les terrasses et les ruines entourées de montagnes nous offrent un spectacle impressionnant. ll faut quatre heures pour couvrir les 120km ce trajet. Vous êtes accueillis chaleureusement dans ce train de luxe qui reflète tout le faste de l’époque du Pullman des années 1920. Composé de deux voitures avec bar et restaurant, le train transporte jusqu’à 84 personnes. Départs, toute l’année du lundi au samedi.
Andean Explorer, ce petit train de luxe vous invite à un voyage qui nous conduit de Cuzco à Puno et fait partie des grandes aventures ferroviaires d’une vie. Long de 408 km, ce voyage de huit ou dix heures, offre une succession de paysages grandioses, entre montagnes et nuages, un parcours au cœur du Pérou indien, qui s’achève sur les bords du Lac Titicaca. Ce lac est le plus haut lac navigable du monde, situé à 3 812 m d’altitude. Selon la mythologie inca, le lac Titicaca serait la matrice d’où serait sorti le monde. En aymara Titikaka signifie « puma de pierre ». La voie ferrée fut longtemps le moyen de transport le plus sur et le plus confortable entre Cuzco et Puno. La ligne, ancienne compagnie d’état, a été privatisée, elle est aujourd’hui réservée presque exclusivement au tourisme.
Les départs ont lieu trois fois par semaine, de la gare de Wanchaq à Cuzco. Les wagons de l’Andean Explorer sont joliment décorés, avec vue panoramique rappelant aussi les fameux trains Pullmann des années vingt, avec bar et restaurant.