Le nord du Pérou, nouvel eldorado des trekeurs

Par Mathilde Giard pour Cotal-France, copyright

Le sud du pays bouchonne, avec des quotas pour visiter le Machu Picchu et parcourir le Chemin des Incas qui y mène à pied. Nouvelle région à tirer son épingle du jeu : le nord méconnu qui livre ses joyaux aux amateurs d’aventure. Le Pérou, où se tiennent en avril prochain des élections présidentielles, a encore accueilli, le premier semestre 2015, 8% de visiteurs de plus que l’année précédente.

La citadelle de Kuelap

treck.jpg On se prendrait presque pour André Malraux découvrant les ruines d’Angkor enfoui dans les broussailles au siècle dernier, en 1923. Ou pour Indiana Jones dans Les Aventuriers de l’Arche perdue… Après trois jours de trek à travers les Andes, l’approche de la forteresse de Kuelap se mérite. Les guides, non habitués à prendre soin des mollets des vacanciers aventuriers, grimpent droit vers le sommet, plutôt qu’une montée en lacets rendant la marche plus douce. Heureusement, les feuilles de coca mâchées pendant au moins vingt minutes (expérience vécue) donnent un sacré coup de pouce ! L’arrivée dépasse les espérances : les ruines de ce centre administratif et lieu de rituels sacrés des Chachapoyas, une civilisation pré-inca, dominent un paysage somptueux, entourées de bosquets d’orchidées sauvages dans un ciel brumeux. Deux lamas passent par là comme par miracle pour la photo ; seule une poignée de touristes et d’écoliers péruviens déambulent à travers les vestiges des 450 habitations circulaires datant du 10e siècle. Ses habitants furent massacrés au 16e siècle, par des tribus voisines. Les chroniques espagnoles racontent que la gentillesse et la beauté des femmes en avaient fait l’une des ethnies favorites des dirigeants inca qui les choisissaient comme concubines… Les guides contemporains parlent, eux, de « futur Macchu Picchu du nord », perché à 3000 mètres. Avis aux amateurs de contrées inexplorées : qu’ils se précipitent avant la construction, d’ici un an ou deux, d’une télécabine construite par une société française, qui pourra hisser jusqu’à mille touristes par heure vers ce trésor archéologique.

La momie de Rascar Capac

village-troglodyte.jpg Au pays des Chachapoyas, les amateurs de trek se baladent le long du sentier en balcon menant à leur nécropole de Revash. A flanc de falaise, les édifices funéraires aux allures de petites maisons troglodytes, colorées d’ocre et de rouge, ont été pillés depuis belle lurette. Mais des momies récupérées intactes dans une tombe sont exposées dans le passionnant musée de Leymebamba. On croit y voir, derrière sa vitrine, le clone de la momie de Rascar Capac, de Tintin et les Sept boules de cristal, un prince inca momifié justement originaire du Pérou…
Autre terrain de jeu : les alentours de Cajamarca, où le dernier empereur inca, Atahualpa, fut tué par le conquistador Francisco Pizarro, en 1533. Dans l’ancienne cité coloniale, on visite la « chambre de la rançon », que le monarque indien fit remplir une fois d’or et deux fois d’argent contre la promesse, non tenue, de sa liberté. On explore le site de Cumbemayo, en longeant les vestiges d’un ingénieux système hydraulique vieux de 3000 ans, au pied de gigantesques tours de pierre sculptées par la nature. Après avoir approché l’impressionnante chute de Gocta et traversé des rizières, on traîne enfin ses guêtres au bord de la mer. Petite pause sportive sur la plage, à bord d’une embarcation traditionnelle dans la station balnéaire de Huanchaco, port de pêcheurs proche de Trujillo. On enchaîne ensuite avec un circuit culturel, sur les traces de la civilisation Moche, autour des temples de la Lune et du Soleil, et au musée de Sipan pour contempler d’éblouissants bijoux en or, avant de déambuler à travers les vestiges de la cité en pisée de Chan-Chan, rivale des Incas au 15e siècle.

Tourisme en hausse et gastronomie reconnue

peru.jpg Pas de doute, le nord du Pérou prend du galon auprès des amateurs d’aventure. Le sud, et sa mythique citadelle sacrée du Machu Picchu, attire chaque jour des milliers de visiteurs, amenés par un train. Tant et si bien qu’un quota est mis en place : le site a été conçu pour des habitants aux pieds nus, et non une horde de touristes en grosses chaussures de randonnée… Le Chemin de l’Inca – Inca Trail – qui y mène, de quatre jours et trois nuits, voit aussi son accès limité, si bien que les agences locales font flamber les prix et qu’il faut réserver des mois à l’avance.
De quoi inciter les tours opérateurs à développer des itinéraires dans le nord de ce pays qui s’étire le long du Pacifique sur près de 2500 kilomètres. D’autant que le Pérou recèle un potentiel certain : le nombre de visiteurs a augmenté ce premier semestre 2015 de 8% par rapport à début 2014, accueillant 2 millions de touristes au total. Parmi eux, 140 000 Français, un pourcentage en hausse de 7% pour l’Hexagone, en deuxième position sur le marché européen, derrière les Allemands. Le pays compte, parmi ses atouts, sa gastronomie. Fin 2015, au Maroc, les World Travel Awards, sortes d’oscars du tourisme, lui ont décerné le titre de meilleure destination gastronomique au monde, pour la quatrième année consécutive ! En avril, Lima accueillera le deuxième forum mondial du tourisme gastronomique organisé par l’Organisation mondiale du tourisme.

Vent andin sur Paris

lama.jpg Saviez-vous que le premier foodtruck étoilé Michelin, situé à San Francisco, propose de la cuisine péruvienne ? Le camion Sanguchon vend des sandwichs réputés divins… Ce vent andin souffle jusqu’à Paris où l’1ka ( !) a soufflé sa première bougie en septembre. Ce restaurant branché revisite les couleurs des hauts plateaux péruviens. Au menu ethnico-contemporain du chef Julien Burbaud : « chicharon de calamar » « teres major en saltado », « ceviche de légumes frais »… Par ailleurs, depuis octobre, un nouveau bar à cocktail, le Casa Picaflor, petit frère de deux autres restaurants du même nom dans la capitale, a ouvert dans le quartier Etienne-Marcel, où déguster des spécialités autour d’un verre de Pisco Sour, grand classique à base d’eau de vie de raisin, de citron vert et de sucre de canne.